Concorde – Description générale

Synthèse du Comité technique I.A.T.A., articles publiés dans la Revue Air et Cosmos, n° 70 et 71 des 12 et 19 septembre 1964

Structure

La structure de l’avion a été étudiée de façon à répondre aux exigences combinées des autorités franco-bri­tanniques basées sur le BCAR anglais et la norme AIR 2051 française, cette derniè­re tenant compte des exigences améri­caines définies dans le CAR 4 B.

La courbe donnant les limitations de la vitesse en fonction de l’altitude montre les vitesses maximales atteintes en croi­sière. Aux altitudes normales de croisière entre 17.000 et 19.000 mètres, dans des conditions atmosphériques standard le nombre de Mach de 2.2 correspond à une vitesse vraie de 2.340 km/h. La vitesse de piqué retenue pour le calcul a été choisie de façon à assurer une marge suffisante par rapport aux vitesses de croisière pour couvrir les écarts causés par des manœu­vres intempestives, des perturbations at­mosphériques telles que rafales et jet streams ou discontinuités de température.

Les intensités des rafales aux altitudes de vol en supersoniques sont suffisam­ment faibles pour que la vitesse de croi­sière maintenue en atmosphère agitée n’entraîne pas de pénalisations structura­les. Toutefois, en régime subsonique la rencontre de turbulences nécessite une réduction de vitesse comparable à celle des avions en service.

Les facteurs de charge limite corres­pondant au domaine des manœuvres sy­métriques sont + 2,5 et – 1 comme pour les avions de transport classiques. Les charges de pressurisation correspon­dent à une différence de pression maxi­mum de 750 mb pour la cabine et à 150 mb pour les réservoirs structuraux de l’ai­le (permettant de maintenir une pression absolue de 230 mb à 19.000 mètres).

L’endurance de la cellule est un fac­teur essentiel pour le dimensionnement. Etant donné les écarts d’ambiance ren­contrés par Concorde, les effets cumulés de fatigue et de fluage sont des fac­teurs très importants dans la détermina­tion des niveaux de contraintes compati­bles avec une vie en fatigue donnée.

L’élasticité inhérente de l’aile effilée et mince de Concorde a des répercussions importantes. Aussi le dimensionnement des extrémités de l’aile est largement influ­encé par des considérations de rigidité minimale indispensable pour prévenir l’apparition de flutter et assurer une bon­ne efficacité des gouvernes.

Toutes les charges de calcul peuvent être supportées sans ruptures ni déforma­tions permanentes. Le dimensionnement de la structure de base a été effectué en ayant en vue une vie en fatigue au moins égale à 30.000 heures.

La conception fail-safe a été appliquée dans la mesure du possible, la solution multipoutre utilisée permet d’assurer l’acheminement des efforts dans le cas d’une défaillance partielle ou totale d’un élément important sans entraîner la rup­ture de l’ensemble ni abaisser la résis­tance résiduelle en dessous d’un standard suffisant pour tenir les charges appliquées en vol normal. Le niveau général des con­traintes est peu élevé et écarte le risque d’une rupture catastrophique de la struc­ture qui pourrait être provoquée par des criques ou des défaillances locales surve­nant entre les révisions périodiques.

Aux vitesses de croisière atteintes par Concorde, le frottement de l’air contre le revêtement se transforme en chaleur et se traduit par une élévation de la tem­pérature de la structure.

En croisière à Mach 2.2 les tempéra­tures les plus élevées à l’extérieur de la cellule atteignent 153° C pour le nez du fuselage et 130° C pour le bord d’attaque de l’aile. En dehors de ces endroits la température d’équilibre s’établit aux en­virons de 120° C.

Les effets sur la structure des tempé­ratures ambiantes élevées sont de deux sortes : la résistance des métaux décroît lorsque la température augmente (certains matériaux étant plus affectés que d’au­tres). Toutefois ce sont les propriétés ré­siduelles après refroidissement qui impor­tent pour la majeure partie de la structure, le dimensionnement correspondant soit au vol subsonique, soit aux manœuvres au sol. Deuxièmement, le maintien à tempé­rature élevée associé avec l’application continue de charges, donne du fluage, qui se traduit par des déformations per­manentes de la structure.

Les contraintes thermiques sont à pren­dre en considération chaque fois que le gradient de température entre les diffé­rentes parties de la structure est impor­tant. Durant l’accélération, la températu­re des semelles du longeron caisson de l’aile monte rapidement, alors que les par­ties centrales des âmes correspondantes n’atteignent leur température d’équilibre que très progressivement. L’inverse se passe durant la décélération.

Dans les avions subsoniques les con­traintes thermiques sont faibles et n’ont aucune influence pratique sur le dimen­sionnement. Dans l’avion supersonique, ces contraintes sont suffisamment importantes pour influencer aussi bien le dimension­nement de la structure que le programme des essais. A Mach 2.2 lorsque la tempé­rature d’équilibre atteint 120° C dans les régions éloignées des bords d’attaque, l’AU2GN a été considéré comme l’alliage léger convenant le mieux à la structure principale de Concorde. Le titane et l’acier sont peu utilisés et seulement dans le cas où cela présente un avantage.

Description de la cellule

La majeure partie de la structure est de type conventionnel et utilise principale­ment l’alliage d’aluminium AU2GN.

Le fuselage bilobé pressurisé est cylin­drique sur presque toute la longueur, le nez et la queue non pressurisés ont une forme ogivale.

Les arceaux des cadres espacés de 53 centimètres supportant des panneaux de revêtement à lisses très rapprochées cons­tituent un ensemble optimum pour résis­ter aux charges de vol et de pressurisa­tion. La plupart des lisses sont étirées, soudées par points dans toutes les par­ties accessibles. L’épaisseur du revêtement correspond aux charges dimensionnantes locales mais sans que l’épaisseur des pa­rois de la cabine pressurisée descende au-dessous de 1,4 mm. Les bordures des hu­blots font partie des panneaux usinés à raidissage intégral. Ces panneaux sont pris dans des plaques en alliage d’aluminium et chacune couvre plusieurs hublots. Les surfaces transparentes des hublots sont du type fail-safe, l’isolement thermique étant assuré par le panneau extérieur et la pres­sion tenue par un panneau double. Cha­que fois que cela est possible les portes de visite sont du type non travaillant. La conception de la partie arrière du fuselage tient compte des niveaux sonores appli­qués, le maillage prévu permettant de ré­duire au maximum les effets de la fatigue acoustique.

L’aile caisson multi-longeron effilée et mince constitue les réservoirs intégraux, supporte les nacelles des réacteurs et contient le logement du train principal.

L’alliage d’aluminium AU2GN est utilisé pour la structure. Les panneaux de revê­tement et les pièces supportant des char­ges élevées sont à usinage intégral. Les tronçons de l’aile centrale compris entre les nacelles et les longerons principaux traversant le fuselage sont cons­truits comme des ensembles complets, les cadres correspondants aux longerons prin­cipaux faisant partie de ces derniers. Les pointes triangulaires des demi – ailes avant forment également des ensembles, leur fixation sur le fuselage se faisant au droit des longerons dont les efforts sont trans­mis aux traverses situées dans les par­ties inférieures des cadres principaux. Les portes de visite donnant accès à l’équipe­ment situé dans l’aile sont du type non travaillant chaque fois que cela est pos­sible, mais les portes d’inspection des ré­servoirs et les portes de l’extrados de l’aile au droit des nacelles sont du type structural.

Les nacelles suspendues sous l’aile com­prennent les entrées d’air, le logement des réacteurs et les structures supportant les tuyères. Les entrées d’air sont en al­liage d’aluminium avec des bords d’atta­que en acier. A l’exception des portes d’accès aux réacteurs, en titane, la struc­ture des nacelles entre les cloisons pare-feu et le longeron arrière de l’aile est en acier, principalement du type nids d’abeil­les. La structure située après le longeron arrière est également en acier mais du ty­pe classique.

La dérive est également du type caisson multilongeron, la plupart des longerons étant usinés à raidissage intégral. Des ner­vures et des longerons usinés sont utili­sés au voisinage des paliers de fixation des gouvernes de direction et également dans les régions où l’épaisseur de la dé­rive est insuffisante pour permettre une construction en tôle raidie, par exemple dans le saumon et le bord d’attaque. Les panneaux du revêtement sont du type usi­né à raidissage intégral. Comme pour le fuselage arrière, la structure de la dérive a été étudiée pour minimiser les effets de fatigue acoustique.

Installation électrique

Sur Concorde, l’énergie électrique a été choisie pour assurer le contrôle des réac­teurs, l’alimentation en combustible et son transfert pour le ballastage, la commande et le contrôle des servo-dynes actionnant les gouvernes, la navigation, les commu­nications et autres services essentiels. La sécurité de fonctionnement des circuits vitaux est obtenue en dédoublant les équipements et en rendant indépendante leur alimentation et leur commande. L’ins­tallation est divisée en deux systèmes in­dépendants dont tous les circuits restent séparés.

L’énergie électrique est fournie par qua­tre alternateurs de 40 kVA à auto-excita­tion, sans balais ; leur voltage est réglé sur la barre omnibus à 115 volts par pha­se. Leur fréquence est maintenue à 400 hZ à l’aide d’une transmission à vitesse constante tournant à 8.000 tours-minute entraînée par chaque réacteur. Un dé­brayage mécanique est prévu pour le cas de panne d’un alternateur. Le refroidisse­ment des alternateurs est assuré par l’huile utilisant le combustible comme source froide. Trois alternateurs peuvent, à eux seuls, fournir toute la puissance né­cessaire y compris celle requise pour le dégivrage, tout en conservant une marge suffisante en cas d’extension ultérieure du bilan électrique. La puissance nécessaire au dégivrage a été divisée en deux moi­tiés dont chacune est fournie par l’un des alternateurs de chaque sous-système. Un dispositif de transfert est prévu pour as­surer l’alimentation en cas de panne d’un des alternateurs.

La tension nominale de l’alimentation en courant continu est de 28 volts. La puis­sance est fournie par 4 transfo-redresseurs branchés deux par deux en parallèle de façon à former deux systèmes à courant continu séparés. Un seul transfo-redresseur est capable d’assurer la charge totale d’un sous-système.

Dégivrage

Le système de dégivrage a été établi surtout pour protéger les réacteurs contre l’ingestion excessive de glaçons aux vi­tesses subsoniques. La protection de la cellule contre le givrage ne pose aucun problème car l’accumulation de glace sur une aile delta effilée ne doit pas aug­menter la traînée de façon inacceptable ni causer d’instabilité aérodynamique. Etant donné réchauffement cinétique du revêtement, il n’est pas nécessaire de pré­voir de dégivrage en vol supersonique.

Le système de dégivrage est principale­ment électrique ; l’air chaud est cepen­dant utilisé aux endroits où il est plus commode. La partie des bords d’attaque de l’aile située au droit des entrées d’air, les bords d’attaque des nacelles et les portes situées dans les entrées d’air sont dégivrés électriquement, cependant que les rampes d’entrées, les carènes de nez et les aubes directrices orientables des réacteurs sont dégivrées par de l’air chaud prélevé sur les compresseurs. Un dégivra­ge électrique continu exige une trop gran­de proportion de la puissance électrique disponible. En conséquence le Concorde utilise un système de dégivrage par cycle qui permet d’appliquer à tour de rôle la puissance maximum disponible (50 kVA) sur les petites surfaces dans un or­dre déterminé.

Le dégivrage électrique comprend 2 sys­tèmes indépendants ; chacun d’eux com­prend l’aile et une nacelle d’un côté de l’avion et est alimenté par un alterna­teur séparé. Les surfaces dégivrées par chaque système sont divisées en huit ré­gions élémentaires alimentées à tour de rôle durant 12,5 secondes toutes les 100 secondes. La période d’alimentation de 12,5 secondes est elle-même répartie entre quatre subdivisions des régions élémen­taires. Il y a donc en tout 32 petites sur­faces par côté, alimentées périodiquement toutes les 100 secondes en courant haute énergie durant 2,5 ou 5 secondes suivant l’emplacement. La durée du cycle a été déterminée de façon que le dégivrage se produise avant que le dépôt ait atteint des dimensions susceptibles d’endommager les ailettes du compresseur.

Dans les vitres du pare-brise est incor­porée une mince pellicule conductrice transparente qui permet le dégivrage des glaces avant et le désembuage des glaces latérales.

Installation hydraulique

La mise en œuvre des servitudes hydrau­liques se fait par deux circuits princi­paux indépendants, chacun d’eux ayant son propre circuit de secours également indépendant. La pression d’utilisation de 276 bars satisfait diverses exigences con­cernant les servodynes, la rapidité des déplacements des vérins en vol superso­nique, les efforts à fournir aux faibles vi­tesses, les poids et les encombrements ac­ceptables.

Le fluide choisi est l’Oronite M2 dont les températures d’utilisation vont de – 60° à + 250°C. Les températures des circuits sont limitées au moyen d’échangeurs de chaleur qui abaissent à 150°C la température d’entrée dans les pompes.

Les deux circuits principaux sont ali­mentés chacun par une pompe à débit variable pouvant fournir 150 litres/minu­te. Les deux circuits de secours sont éga­lement alimentés par des pompes à débit variable, chacune pouvant fournir 75 li­tres/minute. Les pompes des deux cir­cuits principaux sont en fonctionnement durant le décollage et l’atterrissage lors­que le bilan hydraulique passe par un ma­ximum. Des clapets sélecteurs sont pla­cés de façon à empêcher toute baisse de pression dans les commandes de vol lors­que l’on fait rentrer ou sortir le train d’atterrissage.

L’énergie hydraulique des circuits prin­cipaux est utilisée pour faire fonctionner la commande des gouvernes, les sensa­tions musculaires, le train d’atterrissage, les freins, l’orientation du train avant, la visière, le nez basculant, et les quatre pompes placées dans le réservoir arrière de ballastage pour assurer le transfert du combustible ; les surfaces à géométrie va­riable des entrées d’air sont actionnées par un système hydraulique qui est indé­pendant du système principal.

Chaque réacteur entraîne une pompe principale et une pompe de secours. Les deux pompes de chaque circuit sont ré­parties entre les réacteurs se trouvant chacun d’un côté de l’avion. De cette fa­çon, lorsqu’un réacteur est en panne tous les circuits continuent à fonctionner et en cas de panne simultanée de deux réac­teurs d’un même côté, les deux circuits principaux restent en fonctionnement.

La sécurité du bon fonctionnement des servocommandes de vol est assurée en prévoyant un système d’alimentation prin­cipal et un système de secours, tous in­dépendants pour chaque vérin unitaire du jumelage qui actionne les gouvernes.

Commandes de vol

Le pilotage de l’avion se fait en lacet par un gouvernail comportant deux volets, en tangage et en roulis par des élevons formant le bord de fuite des deux ailes et comportant chacun trois volets. Tous les volets sont manoeuvres indépendamment au moyen de servo-dynes commandées à partir du poste de pilotage double à pé­dales et volants classiques.

En fonctionnement normal les mouve­ments mécaniques profondeur, gauchis­sement, direction sont transformés en signaux électriques agissant directement sur les électro-valves commandant les ser­vo-dynes des volets respectifs. Des sensa­tions musculaires hydrauliques sont pré­vues afin de parer à des actions trop bru­tales du pilote pouvant se traduire pour l’avion par des surcharges aérodynamiques excessives. L’auto-stabilisation améliorant l’amortissement des oscillations rapides en tangage, roulis et lacet est également pré­vue. L’action du pilote automatique s’ef­fectue à l’aide de signaux électriques in­troduits dans le circuit normal comman­dant les servo-dynes hydrauliques.

Chaque servo-dyne comprend deux vé­rins hydrauliques alimentés par des sour­ces indépendantes et commandés par des circuits électriques différents. Comme cha­cun des vérins est capable de manoeuvrer séparément le volet correspondant, le sys­tème est complètement fail-safe.

En cas de panne simultanée des deux systèmes de commande principaux provoquée par une défaillance électrique dou­ble, la commande est assurée automati­quement par le système de secours. Le système de secours comporte une trans­mission mécanique assistée par une ser­vo-dyne hydraulique et constituée par câ­bles et bielles agissant sur les valves des vérins hydrauliques commandant les volets des gouvernes. Comme pour les systèmes principaux les braquages de chaque volet sont indépendants.

Les qualités de vol du Concorde seront différentes de celles des transports sub­soniques par suite d’un changement im­portant de formes. Toutefois, les manoeu­vres de l’avion ne seront pas plus diffi­ciles. Etant donné l’importance de l’iner­tie longitudinale par rapport à l’inertie transversale les réponses en tangage seront relativement plus lentes et celles en rou­lis plus vives.

Les variations de la stabilité longitudi­nale produites par le recul du centre de poussée en vol supersonique sont com­pensées par un déplacement équivalent du centre de gravité. Le ballastage est obte­nu grâce au transfert de combustible vers l’arrière durant l’accélération transsonique et le processus inverse en décélération. Etant donné la valeur du débit prévu pour les pompes de ballastage la rapidité du transfert dans l’un ou l’autre sens n’est jamais critique et les délais de réaction exigés de l’équipage sont suffisamment longs. Le comportement de l’avion en uti­lisation normale est ainsi parfaitement classique.

Etant donné la valeur élevée du rapport poussée/poids les longueurs de piste né­cessaires pour le décollage sont plus fai­bles que pour les jets actuels, mais les vitesses minima de contrôle sont légère­ment plus élevées étant donné l’absence totale de dispositifs hypersustentateurs. Les vitesses d’approche correspondent sen­siblement aux standards actuels tandis que les assiettes précédant l’atterrissage ou suivant le décollage sont de 2 à 3° plus inclinées. Durant l’approche la stabilisation de la vitesse se fait à l’aide d’une auto­manette des gaz toutefois ce perfection­nement n’est pas indispensable pour l’atterrissage.

Poste de pilotage

Le poste de pilotage est aménagé pour 3 membres d’équipage : pilote, co-pilote et mécanicien. Une place est prévue pour un observateur éventuel. A droite de l’entrée du poste se trouvent les panneaux du mé­canicien, à gauche les tableaux de distri­bution électrique avec leurs disjoncteurs. Au droit de chaque pilote se trouve une banquette latérale portant le panneau de commande de la radio.

Chacun des pilotes dispose d’un volant et de pédales réglables classiques. De cha­que côté de la planche de vol principale se trouvent les instruments de vols es­sentiels et au centre les instruments et les commandes communs aux deux pilo­tes. Les planches de bord sont surmon­tées d’un auvent destiné à diminuer la réflexion des instruments de vol dans le pare-brise.

Cet auvent porte les avertisseurs lu­mineux généraux ainsi que les boutons commandant les extincteurs des compar­timents réacteurs. Un écran servant à l’at­terrissage automatique est prévu dans la partie supérieure.

Un pupitre central situé entre les deux pilotes porte les manettes de gaz, les commandes de réserve, de réchauffe éven­tuelle et de trims, l’automanette et les boîtes de commande du pilote automati­que, de la navigation, de la radio et des communications essentielles ainsi que la commande de secours de la visière. Le restant des instruments et des comman­des utilisés en vol par les deux pilotes est placé au plafond sur un panneau central à facettes normales au champ de vision.

En plus d’un éclairage intégral, tous les instruments sont pourvus d’un éclairage d’ambiance. Un éclairage blanc électroluminescent est prévu pour les boutons de commande et les inscriptions sur les pan­neaux. Les deux glaces frontales du pare-brise à dégivrage intégral sont capables de résister à l’impact éventuel des oi­seaux. En vol à faible vitesse, une bonne visibilité est assurée grâce à un nez bas­culant de 10° dont la partie supérieure formant visière est escamotée. En vol su­personique, le tout est relevé hydraulique­ment, non seulement pour réduire la traînée mais aussi pour protéger les glaces frontales contre réchauffement cinétique. Une visibilité avant réduite est alors as­surée aux deux pilotes au moyen d’ouver­tures transparentes pratiquées dans la vi­sière. Les glaces assurant la visibilité directe, panneaux latéraux compris, sont à désembuage électrique.

Une attention particulière a été apportée dans la conception du poste de pilotage pour réduire au maximum la fatigue im­posée à l’équipage. Les instruments sont rapprochés et logiquement disposés ; le siège à support pivotant monté sur glis­sières permet aussi bien des mouvements latéraux que longitudinaux suivant le dé­sir du mécanicien. Même en position ex­trême avant, tous les instruments restent facilement observables.

Aménagement

Une cabine continue sans cloisons struc­turales, de section constante sur presque toute sa longueur, confère une souplesse particulière en matière d’aménagements possibles. La largeur de la partie cons­tante au droit des accoudoirs est de 2,62 mètres, sa hauteur de 1,95 mètres au milieu du passage central.

Deux portes d’entrée sont situées sur le côté gauche du fuselage. La première don­ne accès au poste de l’équipage et au compartiment passagers avant, la seconde au compartiment passagers arrière. Sur le côté droit de l’avion se trouve une porte de service donnant accès au Galley. Tou­tes les trois portes sont du type étanche ouvrant vers l’extérieur.

Les toilettes sont au nombre de trois ; une du côté droit entre le poste de pi­lotage et la cabine avant, les deux autres au fond de la cabine arrière.

Il y a 45 hublots de chaque côté de l’avion, chacun offrant une surface de vi­sion directe de 24,6 x 19 cm2. Le pas des hublots étant de 55 cm l’un d’entre eux au moins se trouve adjacent à chaque rang de fauteuils quel que soit l’espace­ment adopté entre les sièges.

Dans la version standard la cabine com­prend deux compartiments séparés par un Galley. Cette disposition permet une sépa­ration des classes et facilite le service en vol. Le compartiment avant permet d’ins­taller soit 6 passagers de première classe à trois de front au pas de 96,2 cm ou 10 passagers de classe touriste à quatre de front au pas de 83,5 cm. Le compar­timent arrière loge 108 passagers à qua­tre de front au pas de 81 cm.

Sur les panneaux inférieurs des porte-chapeaux sont installés les aérateurs indi­viduels, les liseuses et les boutons d’ap­pel, ainsi que les masques à oxygène de secours encastrés. Les parois sont consti­tuées par des panneaux en matière plasti­que facilement démontables.

Performances

Les performances sont basées sur une poussée nominale de 15.900 kg pour cha­cun des 4 réacteurs Olympus 593.

Aux altitudes normales de croisière al­lant de 15.000 à 19.000 mètres, la vitesse maximum par rapport à l’air se trouve li­mitée soit par le nombre de Mach de 2.2 soit par la pression dynamique correspon­dant à 530 nœuds CAS et reste voisine de 1.262 nœuds. La consommation kilo­métrique varie avec le poids et dépend de la température. Dans les conditions stan­dards son optimum est voisin de Mach 2.1

Les longueurs de piste nécessaires résultent des exigences combinées des servi­ces officiels ARB anglais et SGAC fran­çais. Les règlements appliqués assurent au Concorde le même degré de sécurité que pour les avions subsoniques actuels. D’une façon générale, les distances ainsi obte­nues sont légèrement plus courtes que celles de la première génération des longs courriers à réaction.

Les réserves de carburant et les con­sommations forfaitaires ont été établies de façon que Concorde satisfasse à toutes les conditions imposées aux avions sub­soniques. Les vitesses d’attente et les con­sommations prévues sont réalistes et ho­mogènes avec les procédures actuelle­ment en vigueur pour les attentes et les déroutements. Aucune amélioration des procédures opérationnelles ou des moyens de contrôle aérien possibles n’ont été es­comptées pour la période initiale de la mise en service de l’avion.

Décollage

Les performances de décollage ont été déterminées compte tenu des conditions les plus restrictives : distance « balancée » et limitation de pente de montée.

La longueur de décollage dépend de la vitesse de décollage adoptée, comprise en­tre la valeur minimale Vmu et une valeur supérieure de l’ordre de 205 kt. T.A.S.

La loi de montée correspond à une pro­cédure anti-bruit. Elle est définie comme suit :

  • Accélération et montée de 200 kt C.A.S. au niveau du sol à 375 kt C.A.S. à 5.000 ft
  • Montée à 375 kt C.A.S. jusqu’à 39.000 ft, M = 1.147
  • Montée et accélération jusqu’à 45.300 ft, M = 1.8 (530 kt C.A.S.)
  • Montée à 530 kt C.A.S. jusqu’à l’altitude correspondant au nombre de Mach choi­si pour la croisière.
  • Montée à Mach constant jusqu’à l’altitu­de de croisière

Atterrissage

La longueur d’atterrissage est donnée en fonction du poids et en fonction des con­ditions de température et d’altitude.

Les performances sont conformes aux règlements relatifs aux longueurs d’atter­rissage sur piste mouillée, inverseurs de poussée en fonctionnement, l’approche s’effectuant à la vitesse maximale. Le cas critique est celui de l’atterrissage avec un moteur en panne, inverseurs de poussée sur deux moteurs symétriques seulement, le coefficient de longueur de piste étant de 1.10

Réacteurs

Le Concorde est propulsé par quatre réacteurs Bristol Siddeley Olympus 593 munis d’entrées d’air à géométrie variable étudiées par BAC et des tuyères d’éjec­tion comportant des dispositifs de réchauf­fe et d’inversion de poussée étudiés et réalisés par la SNECMA.

L’optimisation des réacteurs correspon­dant à un compromis entre les différentes qualités requises durant le vol. Poussées élevées au décollage, en accélération et en croisière supersonique : faibles con­sommations spécifiques durant la même croisière, les vols subsoniques de dérou­tement et les attentes.

Le réacteur choisi est l’Olympus 593. Sa poussée dans les conditions standards au niveau de la mer atteindra 15.900 kg dans sa version la plus avancée. Il dérive directement du réacteur supersonique très avancé établi pour le TSR.2 avion d’atta­que et de reconnaissance destiné à la RAF. Les compresseurs, haute et basse pression sont mécaniquement semblables à ceux du moteur militaire, mais un débit d’air accru permet d’obtenir la poussée plus élevée requise par le Concorde. Com­me sur les Olympus précédents la chambre de combustion est composée de huit tu­bes à flammes placés dans un carter an­nulaire. L’ensemble turbine a été redes­siné et le premier étage du stator et du rotor sont maintenant pourvus de pales refroidies.

L’ensemble de la tuyère comprend une tuyère qui sera peut-être équipée d’un système de postcombustion, un conver­gent à section variable et volets multiples avec réchauffe et silencieux incorporés, suivi d’un divergent à section également variable incorporant l’inverseur. Le monta­ge de la tuyère sur le réacteur se fait à l’aide d’un joint articulé et des soufflets assurant l’étanchéité des gaz et du carbu­rant tout en permettant la dilatation indé­pendante du réacteur et de la tuyère. Le refroidissement des parois de la tuyère se fait au moyen d’air prélevé dans les piè­ges à couche limite.

Chaque réacteur est alimenté par une entrée d’air individuelle lui assurant dé­bit et rendement optimal. Une rampe à in­clinaison variable incorporée dans la pa­roi supérieure de chaque entrée maintient le rendement des manches à leur niveau maximum dans toute la gamme des vites­ses. La rampe ne règle pas seulement la section du col, elle permet d’ajuster la compression produite par les ondes de choc créées par les lèvres des entrées aux vitesses supersoniques.

Une soupape de décharge à action ra­pide placée dans le diffuseur permet de maintenir l’équilibre entre la masse d’air débitée par l’entrée et celle requise par le réacteur en évacuant au fur et à mesure les quantités d’air superflues. Un volet auxi­liaire d’évacuation est également prévu dans la paroi inférieure de la manche afin d’éviter le refoulement d’air par les lè­vres de l’entrée lors du passage en réduit des réacteurs en vol supersonique. Ce vo­let s’ouvrant en sens contraire permet éga­lement un accroissement sensible de la section d’entrée d’air, c’est-à-dire une amélioration du rendement de la manche durant les points fixes, le roulage, le dé­collage et le vol aux faibles vitesses.

Circuit de combustible

Le combustible utilisé pour l’alimentation des réacteurs du Concorde sert égale­ment comme source froide et peut assu­rer le ballastage de l’avion. Le système de répartition est automatique. Le trim du­rant l’accélération et la décélération su­personiques est obtenu simplement en ef­fectuant un transfert de combustible. Les données nécessaires sont fournies par les jauges de combustible et l’indicateur de centrage. Le circuit a été étudié pour fonctionner normalement jusqu’aux altitu­des de 20.000 mètres avec un combusti­ble courant du genre kérosène, sans que la température de ce dernier excède 80°C quelles que soient les conditions de vol. Les réservoirs sont divisés en deux groupes : réservoirs principaux et réservoirs de ballastage. La capacité utilisable se monte à 99.500 litres environ.

Durant la croisière les variations de centrage sont maintenues automatique­ment dans des limites étroites. Le groupe principal comprend les quatre réservoirs d’alimentation par lesquels tout le com­bustible doit passer avant d’être acheminé vers les réacteurs, ce qui permet de réduire au minimum la quantité de com­bustible inutilisable. Un répartiteur permet, en cas d’urgence, d’alimenter n’importe quel réacteur à l’aide de n’importe quelle combinaison de nourrices.

Le groupe des réservoirs de ballastage permet de maintenir un écart correct en­tre les centres de poussée et de gravité en transférant le combustible vers l’arrière durant l’accélération et vers l’avant du­rant le retour aux vitesses subsoniques. Le groupe de ballastage comprend les réser­voirs extrêmes avant et le réservoir ar­rière. Le réservoir arrière contient 9.500 li­tres, sa vitesse de remplissage est de 1.820 litres/minute et sa vitesse de vidange 2.300 litres/minute.

Tous les réservoirs font partie intégrale de la structure de l’aile ou celle du fu­selage. Les raidisseurs intermédiaires lon­gitudinaux et transversaux ont été conçus de façon à réduire le va-et-vient du com­bustible. L’étanchéité des réservoirs est assurée par des produits de base de caout­chouc synthétique et les surfaces intérieu­res sont protégées contre les effets du développement de micro-organismes.

Toutes les pompes sont démontables sans qu’il soit nécessaire de vidanger les réservoirs.

Le remplissage s’effectue à l’aide de quatre prises, deux dans chaque logement de train principal, communiquant avec le système de transfert de combustible de chaque côté de l’avion. La vitesse nor­male de remplissage est de 4.550 litres/ minute sous pression de 3,5 bars. La vi­dange se fait à travers les mêmes prises, la succion appliquée étant de 0,76 bars.

Deux systèmes indépendants de mise à air libre et de pressurisation assurent l’ar­rivée et la sortie de l’air de chaque ré­servoir dans toutes les conditions de vol ou de fonctionnement au sol.

L’air des réservoirs est maintenu à pression ambiante jusqu’à une altitude de 13.400 mètres et à une pression absolue de 155 mb au-dessus de cette altitude.

Le carburant est utilisé comme source froide pour absorber l’excédent de cha­leur de l’air de conditionnement de la ca­bine, pour refroidir le fluide hydraulique, l’huile de lubrification des « constant speed drives », des réacteurs et des al­ternateurs.

Le conditionnement d’air

Le conditionnement d’air de Con­corde est basé sur la séparation des systèmes d’alimentation, les prélèvements d’air s’effectuant au dernier étage des com­presseurs haute pression. L’air prélevé tra­verse deux échangeurs, refroidit par de l’air et par le carburant, il est ensuite com­primé, puis détendu dans une turbine après passage dans un troisième échangeur.

Navigation

Le Concorde devra être équipé en pré­vision de conditions qui, aussi bien en route que dans les zones terminales, se­ront plus sévères qu’elles ne le sont ac­tuellement.

Dans les zones terminales, le Contrôle exigera une heure estimée d’arrivée avec une précision de 3 minutes à partir d’un point situé à 30 minutes de l’arrivée. Pour obtenir cette précision, l’erreur de posi­tion ne doit pas dépasser les limites d’une ellipse de 20 M.N. dans l’axe de la route et 100 M.N. en travers de la route. En fait, l’erreur latérale doit être infé­rieure à 30 M.N. pour satisfaire aux sé­parations du trafic à plus basse altitude.

Etant donné les progrès prévus pour les installations du Contrôle du trafic aérien, tels que le radar à liaisons discriminées, le système de navigation du Concorde se­ra capable de recevoir et d’envoyer des signaux dans une forme qui soit compa­tible avec ces systèmes. De même, à bord de l’avion, les écrans des appareils de na­vigation seront susceptibles d’une inter­prétation facile par les pilotes et com­prendront une représentation cartographique.

Le système de navigation pourra opérer de jour et de nuit dans tous les points du globe, et sera compatible avec les procédures en usage sur les différentes routes.

Service aux escales

Le Concorde a été conçu de façon que le temps qui sépare le moment où l’on coupe les gaz et celui où les réacteurs sont remis en marche soit le plus court possible : 30 minutes pour une escale in­termédiaire, une heure en bout de ligne.

Presque tous les accès aux servitudes ont été localisés sur le côté droit de l’avion. Ainsi, l’entrée des passagers reste libre durant toutes les escales. En parti­culier, il est possible de mener parallè­lement toutes les activités susceptibles d’influencer la durée des escales. La ma­nutention des bagages et du fret, les pleins de carburant, le ravitaillement du galley et de toutes les servitudes sont in­dépendants.

L’entrée et la sortie des passagers peuvent se faire au moyen de rampes d’accès télescopiques.

Les manipulations du fret et des baga­ges des différentes soutes sont indépen­dantes. L’accès de la soute principale si­tuée à l’arrière du fuselage se fait par une porte ventrale.

L’accès au galley se fait par une porte spéciale située sur le côté droit de l’avion. Les dimensions de cette entrée, 120 cm par 60 cm, permettent le chargement de tous les containers, repas et boissons, susceptibles d’être utilisés sur Concorde.

Vingt minutes suffisent pour assurer le ravitaillement en combustible durant une escale intermédiaire normale. Les citernes normales à doubles raccords dont le débit se fait sous 3,5 bars conviennent parfai­tement pour cette opération.

Toutes les prises de terrain, électricité, air conditionné, hydraulique, eau et vidan­ge sont de types courants.

Les procédures destinées à faciliter les inspections, l’entretien et les réparations ont été établies avec beaucoup d’atten­tion. L’équipement a été groupé par sys­tèmes pour faciliter la recherche des pan­nes et l’entretien, les différents accessoi­res ont été étiquetés et placés de façon à rendre plus rapides l’identification et le démontage. Les parties de la structure les plus exposées aux détériorations ont été étudiées de façon que leurs réparations ou leur remplacement prennent le mini­mum de temps.

Les calculateurs de bord seront utili­sés pour les « check-lists » d’avant et après vol, y compris celles concernant les réacteurs et tes systèmes dans le cas de révisions rapides.

Un bruit intolérable

Le bruit du Concorde affectera deux ca­tégories de la population : les voisins des aéroports (bruits des réacteurs) et les ha­bitants des régions survolées (ondes de choc dont l’intensité dépend de la confi­guration de l’avion et de la technique adoptée pour le vol).

Bruit du réacteur : La façon dont la poussée est obtenue et la manière dont les réacteurs sont ins­tallés peuvent, dans une certaine mesure, pallier l’accroissement du bruit lié aux puissances plus grandes exigées des réac­teurs supersoniques.

L’installation sur Concorde des réac­teurs Bristol Siddeley Olympus deux par deux permet une réduction du niveau de bruit de 7 PNdb à la poussée maximum grâce à l’effet de groupage. De plus, les lobes du silencieux installé sur la tuyère primaire à section variable donnent une réduction supplémentaire de 5 à 6 PNdb.

Le niveau de bruit à prévoir au mo­ment du survol du point de référence dé­pend des caractéristiques de la montée initiale et de la réduction de bruit ob­tenue en adaptant le régime des réac­teurs. En ajustant la section des tuyères d’éjection des Olympus, il est possible de réduire la vitesse d’éjection des gaz cor­respondant à une poussée donnée et de minimiser ainsi le bruit produit.

En résumé, le bruit du Concorde, au voisinage des aéroports, sera tolérable sans qu’il soit nécessaire d’installer de silencieux supplémentaires.

Détonation balistique : Les ondes de choc engendrées par le vol de l’avion supersonique se traduisent par des variations brusques de la pres­sion et produisent un bruit caractéris­tique qui se propage le long des régions survolées.

Suivant tes estimations actuelles, le Concorde croisant à Mach 2.2 au-dessus de 18.000 mètres produira un saut de pression ne dépassant pas 105 millibars, compte tenu du coefficient de réflexion.

Le niveau des ondes de choc tolérable varie beaucoup avec les individus, toute­fois les données statistiques concernant ce problème accumulées dans au moins trois pays semblent indiquer que le bruit du Concorde se maintient dans des li­mites acceptables.

Le bruit critique de survol correspond à l’accélération transsonique pendant la­quelle les surpressions pourront atteindre 140 millibars et entraîner éventuellement des limitations d’emploi, spécialement au-dessus des régions peuplées. En modifiant la loi de montée de façon à commencer plus haut l’accélération transsonique, il sera possible de réduire les surpressions atteintes au détriment d’une consomma­tion de carburant légèrement supérieure.