Ingénieur navigant d’essais. Directeur des Essais en Vol Aérospatiale.
28 juin 1929 – 6 mai 2012.
Texte d’André Turcat
Dès sa sortie de Sup-Aéro en 1953, Henri Perrier est à pied d’œuvre au service d’essais en vol de la SNCASO où l’a embauché Jean Girard, qui aura marqué tous les membres de son équipe aux prises avec des programmes aussi importants que Triton et Espadon, premiers réacteurs français, Vautour, Trident. Tout ce beau monde est réuni en pollinisation au même étage d’un bâtiment sur le terrain de Melun-Villaroche. Henri y rencontre aussi les grands concepteurs Parrot et Servanty.
Apprécié déjà pour la rigueur de son travail, il est envoyé dès 1955 à la fameuse EPNER (Ecole du Personnel Navigant Essais et Réception) où je ne fais plus qu’enseigner la mécanique du vol, mais où je puis déjà le repérer. Dès lors ingénieur navigant d’essais responsable d’avion, Henri Perrier va effectuer la grande part des essais des différentes versions de Vautour jusqu’au supersonique, dont il tâte pour la première fois. Mais la réorganisation décidée au sommet mute toute cette équipe à Sud-Aviation début 1958. A Toulouse, les essais en vol de Caravelle sont au plein régime. Succédant à Roger Béteille, Henri devient, sous l’autorité de Pierre Nadot, l’homme de la certification des versions de Caravelle, la grande mais étroite réussite française. Et je n’ai pas de meilleur choix, dix ans plus tard, que de créer avec lui l’équipe d’essais en vol de Concorde.
Nous gérâmes dès lors pour le mieux la déplorable duplication de responsabilités franco-britanniques. Tandis que les bureaux d’étude de Servanty fixaient les « buts de guerre » du projet, nous déterminions le programme d’essais vol par vol ; puis, en l’air, c’était Henri (ou son substitut) le vrai chef de l’essai, le pilote ne faisant qu’adapter intelligemment et exécuter la trajectoire. Dès avant de me succéder, et la certification de Concorde obtenue, Henri est ainsi parvenu au sommet de son métier. D’ailleurs conscient de sa valeur comme de toutes les exigences de ce métier, il en devient le modèle reconnu pour la rigueur et l’étonnante mémoire qui permettent le jugement le plus éclairé sur les avions mais aussi sur les hommes en toute fraternité de destin.
Le sien l’amènera à endosser la responsabilité Constructeur lors du premier procès de l’accident en juillet 2000. Et il l’assumera littéralement jusqu’à la mort, non sans avoir entraîné l’hommage unanime des avocats et des juges du tribunal de Pontoise qui le relaxe, malgré les réquisitions scandaleuses d’un procureur. Il est, dans l’honneur, l’illustre victime de l’accident, et pour nous l’étoile de la profession.
André Turcat. Revue Mach 2.02 N°44 octobre 2012