Par Alexandra Jolivet, avec la contribution d’Henri Perrier, Yves Pingret et Michel Rétif.
Les règles de certification ont progressé avec le programme Concorde. A partir des années 70, un système d’ultime secours en cas de panne de tous les moteurs est exigé. Les cas sont rares et ne sont envisageables que dans des conditions exceptionnelles : cendres volcaniques ou passage dans des précipitations sévères … En vol, ce n’est pas trop grave à partir du moment où l’on a “de l’eau sous la quille”. L’avion descend, les moteurs tournent en autorotation et continuent à fournir les énergies électrique et hydraulique nécessaires à la conduite du vol. Généralement, l’équipage a le temps de récupérer un ou plusieurs moteurs pour finir le vol en sécurité. Mais en prévision du cas extrême de panne d’alimentation en carburant de tous les moteurs, l’Autorité de certification juge nécessaire qu’un avion de ligne dispose d’un système palliant à la perte d’alimentation des servitudes. Le système envisagé pour Concorde était une turbine à hydrazine. Ce produit étant très dangereux à manipuler, le MEPU ne sera pas monté sur les avions de série. Le musée de l’Air et de l’Espace dispose d’un tel équipement et Alexandra Jolivet, ancienne technicienne de maintenance Concorde à Air France, nous en parle.
Le MEPU a pour but de fournir, en ultime secours, l’énergie nécessaire au fonctionnement des commandes de vol, aux instruments vitaux et au rallumage réacteur en condition « 4 réacteurs éteints ». Il permet l’atterrissage quand les régimes d’autorotation moteur, en dessous de 250 nœuds, ne peuvent plus fournir la puissance tant hydraulique qu’électrique.
Il transforme en énergie mécanique, l’énergie créée par la détente, au travers d’une turbine, des gaz provenant de la décomposition d’un monergol (*), l’hydrazine.
Fonctionnement : la percussion d’une cartouche lance le groupe et réchauffe la chambre. Ensuite, l’hydrazine est injectée directement dans la chambre par de l’azote sous pression contenu dans une bouteille percutée en séquence. Le régime nominal de la turbine est de 109 milles tours/minutes, atteints en 1,5 secondes !! et son autonomie est de 9 minutes en charge normale (c’est-à-dire les 4 réacteurs éteints et en autorotation). L’autonomie de 9 minutes reste à confirmer (ndlr)
Quand le MEPU est allumé, il entraîne 2 pompes hydrauliques : une alimentant le circuit bleu, l’autre le circuit vert lequel fait fonctionner le 5ème alternateur (voir lettre Henri Perrier)
Ce système ne sera pas retenu pour les avions de série qui voleront en ligne car les Compagnies, et en particulier PAN AM, jugèrent que le monergol était un carburant extrêmement dangereux. Il est vrai qu’il y avait de grandes précautions à prendre dans les interventions sur le MEPU, tant au moment du remplissage de la bouteille que lors du remplacement de l’équipement. Il sera remplacé, sur ces avions, par la RAT (Ram Air Turbine), une éolienne cachée sous l’aile et qui se déploie pour remplir le même office que le MEPU.
Seuls les avions de présérie 01 (G-AXDN) et 02 (F-WTSA), ainsi que les série 201 et 202 (F-WTSB et G-BBDG) ont été équipés à l’origine d’un MEPU qui était essayé en vol. Sur les 02, 201 et 202, il sera remplacé par une RAT au cours de la vie de l’avion. Seul, le présérie anglais 01, conservera son MEPU jusqu’au bout.
Les collections du Musée de l’Air et de l’Espace du Bourget contiennent un exemplaire de cet équipement … rare.
AJ
(*) Le monergol est un propergol composé d’un seul ergol. Le propergol est un produit couramment utilisé pour la propulsion de moteur-fusée