Par Jean Claude TRICHET. Article publié dans la Revue Air et Cosmos, n° 159 du 2 juillet 1966
Elliott Automation Ltd, qui s’est vu confier l’étude et la réalisation du système automatique de contrôle de vol pour Concorde, a constitué à cet effet un consortium avec la société Française d’Equipements pour la Navigation Aérienne (SFIBNA) et la division Eclipse Pioneer de la Bendix Corporation (U.S.A.). Chacun des partenaires aura la responsabilité de l’étude et de la fabrication d’éléments de l’ensemble qui sera assemblé et mis au point dans l’usine Elliott de Rochester. Le directeur du programme chez Elliott est assisté des directeurs des deux autres firmes et d’un comité consultatif de neuf techniciens, comprenant des représentants des constructeurs de la cellule. Le programme se déroule normalement suivant un diagramme Pert.
Elliott a livré les premiers éléments du système à Sud-Aviation ; ils seront suivis sous peu par un ensemble des boîtes noires, montées sous une forme permettant un accès aisé à tous les sous-ensembles. Cet ensemble servira à la mise au point sur le simulateur d’essais en vraie grandeur de Toulouse Blagnac.
La forme définitive du matériel est d’ores et déjà acquise et approuvée par Sud-Aviation qui en a reçu les maquettes. La production des ensembles sera probablement répartie entre la France et la Grande-Bretagne.
Cinq éléments principaux
L’équipement est divisé en sous-ensembles : Pilote automatique – Auto stabilisateurs – Trim électrique – Contrôle automatique des moteurs – Calculateurs du directeur de vol.
L’ensemble dérivé de celui du ‘Super ViC 10, offre à l’utilisateur deux possibilités : avec les quatre premiers sous-ensembles doublés et un directeur de vol simple, on obtient un système d’atterrissage automatique «Fail safe».
Avec un pilote automatique simple mais auto surveillé et les autres éléments doublés, on obtient un système automatique monocanal qui décroche en douceur en cas de panne et permet la re prise manuelle avec le directeur de vol dédoublé.
Une sécurité remarquable
On engage le mode d’atterrissage entièrement automatique en plaçant simplement le sélecteur sur «Land» et en armant le deuxième Pilote Automatique. En vol, les deux PA sont sous tension, un seul étant engagé. Le changement automatique n’intervient que pendant la phase d’atterrissage. Dans ce mode, le contrôle vertical de l’avion est entièrement automatique et le contrôle latéral laisse une marge de correction de ± 3° de dérapage que le pilote doit annuler au pied.
Après 100.000 heures d’essais en vol du système de base sur un VC 10, Elliott peut garantir une probabilité de panne de 10 (puissance – 7) maximum. Pour le système amélioré prévu pour Concorde, il est fait appel aux dernières techniques de microminiaturisation et de calcul numérique. Le temps prévu de fonctionnement entre changement d’un sous élément de l’ensemble est de 267 heures. La séparation des ensembles de contrôle longitudinal et latéral diminue encore les risques de panne totale. Dans une étape ultérieure, le système pourra assurer automatiquement le roulement au sol grâce à un contrôle du train avant, à partir d’un ILS précis. En plaçant les manettes des moteurs en position «plein gaz» on pourra aussi effectuer automatiquement un dégagement ou un redécollage d’urgence.
Principe de fonctionnement
Le système fonctionne à partir des éléments fournis par la Centrale à inertie Ferranti-Sagem et par le calculateur de données anémométriques Crouzet-Bendix. Les instruments du directeur de vol, la signalisation électrique, les commandes de vol, commandes moteurs, et le système de sensations artificielles ne sont pas compris dans la fourniture. Un système hydraulique auxiliaire à limiteur applique les ordres du PA au manche, corrigés de ceux du trim électrique. Le panneau de commande situé entre les pilotes, groupe les éléments de contrôle des pilotes automatiques, des directeurs de vol et des systèmes de commande automatique des gaz.
Les commandes de l’auto stabilisateur, du trim électrique et du système de sensations artificielles sont situées sur un panneau de plafond du poste de pilotage. Le pilote automatique reçoit les informations du système de navigation et du calculateur digital et en déduit le profil vertical et horizontal de vol. On peut le coupler aux aides radioélectriques conventionnelles et utiliser les modes d’acquisition d’altitude présélectionnée, de taux de montée affiché, de tenue de vitesse anémométrique ou de nombre de Mach et d’approche à vitesse pré affichée.
Chaque boîte noire est dotée de codeurs et de décodeurs reliés à un calculateur chargé de la vérification du système. On peut ainsi isoler toute panne, en connaître immédiatement la cause et la provenance de façon à pouvoir isoler le sous-ensemble défectueux. Grâce à ce système la durée d’immobilisation au sol entre deux vols peut être réduite en toute sécurité à 35 minutes. L’utilisation de microcircuits et de composants subminiatures, dans un rapport de 1 à 3 respectivement, permet de réaliser toutes ces fonctions avec un équipement dont le poids et les dimensions sont analogues à ceux des systèmes actuels.